Critique « Batman vs Superman vs Les enfants gâtés ».
Hello there !
L’envie me taraudant la pointe du clic depuis un moment et parce qu’ici le jeu se prête à cet exercice périlleux, instant critique. Parce que merde, des fois, y a des choses qui t’agacent et te bousculent dans ton slip. Alors, faut y allez. Et tant qu’à faire d’en être là, faisons donc le point avec cet effroyable, cet immonde, cette redoutable abomination qu’est « Batman vs Superman ». Attention bien sûr : !! MEGA SPOILERS INSIDE !!
La magie du net est là, malgré toute la prudence que j’ai pu observer ce dernier mois, impossible de ne pas croiser une critique, un avis ou la moindre vidéo parlant du tant controversé « BvS ». Et quelles critiques mes enfants ! Si « Man of Steel » s’en était déjà pris plein la gueule, nous passons ici à en croire les critiques, à une toute autre catégorie : celle des films damnés, le panthéon du mauvais, rejoignant, bras ballants et échine courbée, sous les huées de la foule, les autres « Catwoman » et « Green Lantern ». Que dis-je, même ces derniers n’avaient pas eu droit à un tel traitement de faveur. Non, nous parlons ici du pire film de série B de toute l’histoire du cinéma. Que l’on soit proche ou non du cinéma de Snyder est une chose. Respectable tant l’approche cinématographique du monsieur est personnelle. Mais une telle décharge de violence, une telle débâcle de haine… qu’était-il arrivé à notre bon Zackary pour tomber si bas dans les sondages et avoir enfanté aux yeux du monde, d’une telle ignominie ?
C’est donc la mâchoire crispée et les mains moites de honte, que je me suis installé tout penaud dans la salle 15 de l’UGC, pour enfin voir de mes yeux celui que l’on nommait déjà : « El Monstro ! ». Pauvre diable, le cinéma me forçait même à voir ce piètre spectacle dans la plus grande salle. Allez, plus que… 2h30 à serrer les dents.
Au bout de 2h30, mon calvaire était enfin terminé ! Je sortais, le souffle haletant, de ma sombre prison. Ces minutes, ces heures, furent compliquées mes enfants. 2h30 de gâchis total à me demander, à chercher, à comprendre partiellement sans réellement en saisir toute la substance : « POURQUOI » ? Oui, pourquoi tant de haine ? Que s’était-il passé lors du visionnage de ces spectateurs en pur délire pour que « BvS » mérite ce tel flot de violence ?
Pour remettre les choses dans leur contexte, il est indispensable d’être honnête, envers le film et surtout, envers soi-même. Commençons donc par un postulat simple, le film n’est pas un chef d’œuvre, c’est certain, tout le monde en conviendra. Mais après tout, quelqu’un espérait -il vraiment que c’en soit un dans l’assistance ? Malgré ses failles donc, cela empêche-t-il « BvS » d’être un bon film ? Cela l’empêche-t-il de nous offrir des pistes, des promesses, des partis pris et certaines séquences de GRAND cinéma ? Non mes bons agneaux, que l’idée vous irrite les tympans ou pas, bien sûr que NON !
Rappelons avant toute chose la genèse du projet et le postulat de base sur lequel il a été construit. Si la genèse vous barbe, je vous invite à vous rendre directement au chapitre « La critique (et/ou analyse) » après les 7 ou 8 prochains paragraphes. Sinon, c’parti !
La genèse du projet :
Retour donc en 2013 avec la sortie de « Man of Steel« . Zack Snyder reprend donc, après le tout aussi controversé « Superman Returns » de Brian Singer, les reines de Superman. Snyder, habitué aux films très pulp à l’action esthétique slowmo débordante, nous livre ici sa vision de l’homme de fer. Une sorte de demi-Dieu au visage d’apollon, le menton fier et la mâchoire carrée et dont la première volonté est claire : montrer comment être un Dieu parmi les hommes et montrer enfin, à sa juste mesure, la réelle puissance d’un tel être, une fois ce dernier révélé à lui-même et au monde entier. Deux parties se dégagent donc clairement du film et la seconde, bien trop brutale et bien moins introspective que la première, fera l’objet de toutes les critiques salées. Une séquence ralliera particulièrement les critiques de tous bords, fans comme novices : celle de la fameuse destruction de Metropolis, lors d’un combat épique entre l’homme de fer et le général Zod. Pourquoi une telle débâcle d’action gratuite résultant de la destruction des 3/4 de Metropolis et de sa population ? Achevant par la-même l’appartenance humaine de Superman envers ses semblables humains. Tout cela pour servir une action sans autre consistance que d’assouvir les délires bourrins de son réalisateur.
Retour en 2014, la Warner annonce la mise en chantier de la suite de « Man of Steel » intitulée « Batman vs Superman ». Effectivement, n’avons-nous pas vu quelques signes de la présence du caped crusader dans « MoS ». Snyder toujours aux commandes, il va rapidement s’avérer par la suite que non seulement Batman est introduit dans ce nouvel opus mais la promesse d’un futur « Justice League » l’est aussi à travers un titre évocateur : « Batman vs Superman – Dawn of Justice« .
La tâche s’avère donc lourde pour le controversé Snyder et le cahier des charges pour ce prometteur « BvS » s’alourdit de manière conséquente. Le parallèle avec les studios Marvel, déjà en pleine phase 2 de leur franchise et ayant déjà lancé leurs « Avengers », est imparable, voire même indispensable dans ce cas précis. Face à l’avancée massive de la machine Marvel, il est grand temps de profiter de l’univers étendu DC et d’accélérer la machine, quitte à se priver de nombreuses phases d’exposition. Les héros DC profitant de plus d’une présence plus iconique dans les esprits que les héros Marvel, parfois inconnus du grand public (qui ne connait pas Batman ou Superman ?) cela permet de balayer plus rapidement leur introduction et de passer plus directement au cœur du sujet.
Ce cahier des charges, donc, quel est-il ?
– Faire le pont avec « Man of Steel ».
– Introduire Batman qui plus est incarné par Ben Affleck. Rejeté une fois de plus par les fans après l’excellente prestation de Christian Bale dans la trilogie de Nolan, l’annonce du casting de Ben – Batfleck – Affleck dans le rôle du Dark Knight fait l’effet d’une bombe. « Dardevil » restant dans tous les esprits.
– Introduire la « Justice League » à venir et donc, tout le grandiose et le ton épique qu’elle impose. Bah oui, Marvel s’amuse de son côté. Le DCU est exploitable, pourquoi s’en priver ?
– Introduire la « Justice League » en un film, là où Marvel a disposé de 6 ou 7 films pour le faire.
– Plaire aux fans de la première heure, les fans hardcore de DC, fidèles aux comics et exigeants.
– Plaire aux futurs fans et, pourquoi pas, sur un malentendu, plaire aux fans accros à Marvel.
– Plaire au spectateur lambda. Celui qui, membre à part entière du paysage cinématographique, veut juste passer un bon moment devant un film grand public et divertissant. Et qui ma foi, s’en bat les balls de ces pseudo-débats sans fin.
– Faire ça en moins de 3h.
– Le faire bien, proprement et que le film soit parfait.
Ce cahier des charges, base de tout le film, point d’ancrage de toute sa création, impose un constat alléchant, séduisant mais amer : l’entreprise semble, même avec la meilleure des volontés, vouée à l’échec. Devant l’ampleur d’un tel monstre jamais tenté au cinéma, il ne peut pas en être autrement. Reste à éviter le plus possible les pots cassés et puiser des grands moments de bravoure. David S. Goyer, derrière l’écriture d’un certain « The Dark Knight » est à la tâche. Offrant la minute rassurante que tout le monde cherche et suscitant par la même la première confusion dans l’esprit du public. N’oublions pas que Snyder n’est pas Nolan et surtout que « BvS » n’est pas « The Dark Knight ». Les propos, libertés créatives et surtout les enjeux ne sont pas du tout les mêmes.
Deux nouvelles viennent cependant quelque peu rassurer un public toujours prêt à retourner sa veste au moindre son de cloche. Les premières images de Batfleck en Batman promettent du lourd avec un caped crusader lorgnant vers un massif et brutal « Dark Knight returns » de Frank Miller. Ben Affleck, finalement, va peut-être faire le job et le faire bien. Seconde nouvelle, les bases de l’histoire sont dévoilées et mettent cette fois à mal un public pourri gâté, toujours prêt à retourner sa veste au moindre son de cloche. « Batman vs Superman » évoquera donc les conséquences de la destruction de Metropolis sus-citée, avec au cœur de l’intrigue Batman, bien décidé à faire subir à l’homme de fer les conséquences de ses actes. En seconde ligne, des thèmes puissants et prometteurs tel que la place de l’homme le plus puissant de l’univers, la légitimité de ses actions et sa position de Dieu ou de potentiel Démon, dans notre bas monde. Oui, bon, certes, les mauvaises langues se ravisent. Que l’idée ai été pensé depuis le départ, pendant « Man of Steel » ou que Snyder ai écouté les avis de son public par la suite, l’entreprise de rabattage de caqué est réussie, avec les honneurs !
S’en suit le dernier trailer et là encore, le public, prêt à bondir comme un loup affamé à qui on aurait donné du boulgour au lieu d’un steak saignant, enrage ! DoomsDay, vilain emblématique de l’univers DC et grand adversaire de Superman (puisque je vous rappelle qu’il tue Superman dans le numéro 92 de Superman intitulé « Death of Superman ») sera au programme de « BvS » et visiblement, sera l’objet du climax de fin, perso final objet de la réunification des deux surhommes. Nous dirons, des deux surhommes ET de la sur-femme puisque WonderWoman a d’ores et déjà été introduite et rejoindra non pas sous la forme d’un cameo mais bien d’un personnage récurrent, nos deux pépères. Le combat promis entre Batsy et l’homme de fer aura-t-il lieu ou sera-t-il balayé d’un revers de la main au profit d’une baston à quatre entre nos héros et un Doomsday pas très fidèle au comics ? Pseudo ersatz d’un lointain cousin des Trolls de Tolkien et de l’Abomination de l’Incroyable Hulk.
Le film pointe le bout de son nez au cinéma il y a un mois, après une campagne de communication massive et impitoyable sur la rencontre de ces deux géants. La suite, nous la connaissons, un flux continu de retours désastreux en pagaille, venant faire passer le second opus de Mortal Kombat pour un film d’auteur.
La critique (et/ou analyse) :
Il est étrange de voir à quel point les avis et retours sur « Batman vs Superman » sont à l’image du film : complètement schizophrènes. Il n’est bien entendu ici pas question de dédouaner le film de ses erreurs, ni de démontrer par A+B que c’est un chef d’œuvre. Non, il s’agit de démontrer que le film ne mérite pas ce flot de haine. Il s’agit de juger le film pour ce qu’il est, schizophrène donc, basculant d’un instant à l’autre entre somptueux et mauvais goût, entre génie et erreur de débutant. Tout ça à cause d’un appétit dévorant au cahier des charges bien trop ambitieux.
Il est étonnant, pour faire écho à ce que je disais plus haut, de voir combien certains critiques se trompent quant à l’identité même des super-héros qu’ils attaquent. Sans entrer dans des détails laborieux, l’univers DC n’est clairement pas celui de Marvel et il en va de même pour les héros qui les constituent. Batman n’est pas Spiderman et Superman n’est pas Ironman, ou Hulk, voire même Thor, pour prendre un personnage plus à sa mesure. Leur histoire, leur place dans l’inconscient collectif ainsi que leur identité, ne sont pas les mêmes. Si certains critiques fustigent donc le fait d’avoir droit une énième fois à la mort des parents du jeune Bruce, cela n’est pas si évident et mérite une petite nuance. La transformation de Parker en Spidey, de Stark en IronMan ou de Rogers en Captain America, n’a pas la même portée dramatique que celle de la transformation de Bruce Wayne en Batman. La mort de Thomas et Martha Wayne sous les yeux de leur fils, dans une allée poisseuse de Gotham City, n’est pas une excuse ou un simple déclencheur. La mort des parents Wayne est une peinture. Un décor de théâtre prêt à accueillir une sombre tragédie. Une tragédie que tout fan de l’homme chauve-souris se plait à voir, à reconnaitre et à détester. Cimentant la psyché du futur personnage en devenir, cette séquence, même vu et revu, est indissociable du personnage. Qui plus est lorsqu’elle emprunte la superbe mise en scène de « The Dark Knight returns » de Frank Miller et qu’elle permet d’introduire un Batman encore jamais vu, plus sombre que jamais. Rapidement introduite en quelques minutes, avec la maestria dont Snyder a le secret, cette séquence DEVAIT être là. Que le goût des uns ou des autres s’en mêlent, peu importe. Ce n’est ici pas tant une question de goût que de nécessité et de mise en scène. En va pour preuve la séquence suivante.
La séquence suivante donc, continue d’imposer cette rythmique dramatique, en nous plongeant 30 ans plus tard face à un Bruce Wayne témoin d’un nouveau drame, façonnant cette fois l’homme qu’il va devenir pour le reste du métrage. La destruction de Metropolis et de l’immeuble Wayne, scelle à nouveau les ambitions d’un Bruce Wayne qui n’a plus rien à perdre. Nous le découvrirons par la suite, mais qui n’a en réalité plus rien à perdre depuis bien longtemps. Le décorum est prêt, le pont avec « MoS » est parfaitement mis en place. Le point du vu de ce carnage, jadis vécu dans « MoS » depuis les cieux, se faisant dans cette séquence depuis le sol, passant de celui des Dieux à celui des hommes, de celui de Superman à celui de Batman.
La scène suivante dans le désert, maladroite mais subtile, développe l’idée introduite dans les deux séquences précédentes, mais du point de vu de Superman cette fois. Si Superman est le responsable du chaos de Metropolis et de la chute de la tour Wayne, il est aussi capable de sauver sa bien-aimée Loïs où qu’elle soit. Cette notion miroir faisant directement référence à l’impuissance de Batman face à la tragédie ayant provoqué la mort de ses parents. L’important dans cette séquence n’est pas tant le plan machiavélique et certes bancale de Luthor, que d’installer ce parallèle entre la place que tient Loïs dans la vie de Clark/Superman (« You are my world ») et le pouvoir dont il dispose pour la conserver, avec la place que tenaient les parents de Bruce et qu’il fut impuissant à protéger, détruisant par la même le monde de Bruce depuis son plus jeune âge. Parallèle qui sera bien évidement accentué par la suite avec pour Superman la séquence de la salle de bain avec Loïs ainsi que le rêve avec son père et son discours sur Martha (qui aura sa raisonnance plus tard) puis, pour Batman, la mort de Robin et la destruction du manoir Wayne. Dans ce contraste entre la vie et la mort, le soleil et l’ombre, un lien fondamental du métrage unit ici les personnages : l’amour de la famille et de ceux qu’on aime sont les seuls liens forts qui nous maintiennent en vie et font de nous des êtres humains. Car le paradoxe est bien là, à ce moment du récit, le monstre ici n’est pas Superman mais bien Batman, violent, sans pitié car ayant tout perdu. Chacun se retrouve donc avec une quête aux mêmes accents : retrouver son galon d’homme.
Toujours dans cette notion de pouvoir absolu sur la vie et la mort, entre créateur de vie et bourreau, entre Dieu et Démon, l’homme de fer se pose là. Metropolis, avide de réponses quant à la légitimité de la justice de ce Dieu, fait donc appel à la justice de l’homme, dernier rempart de son équilibre. Superman est donc jugé par l’homme afin de déterminer celui qu’il est et surtout, celui qu’il peut éventuellement devenir.
Dans ce duel, un nouvel élément perturbateur va venir tout faire basculer en la personne de Lex Luthor. Bien qu’horripilant à maintes reprises, le personnage campé par un Jesse Eisenberg sous acide, n’en reste pas moins légitime et bien pensé. Si Batman et Superman sont deux hommes abimés par la vie, deux opposés victimes de la vie et d’un destin qu’ils n’ont pas choisi, Lex Luthor se pose là en totale contradiction. Il devient le chainon manquant entre les deux hommes, celui par qui le combat (ou l’union) va arriver. Luthor le dira lui-même « I love bringing people together« . En lieu et place de deux hommes brisés par la vie, nous avons un jeune homme libre comme un électron. Si les deux hommes sont victimes d’un destin tragique, Luthor, lui, est héritier d’une riche famille. Si nos deux héros sont fondamentalement exceptionnels, Luthor, n’a rien de superbe, preuve en est l’approche jeune chef d’entreprise que nous propose Eisenberg. Luthor appartient à son temps tandis que Batman et Superman s’imposent en véritables extra-terrestres dans un monde qui soit ne veut pas d’eux ou dont ils ne veulent plus. Le jeu d’Eisenberg se pose aussi là. Par son comportement frénétique, à cheval entre jeunesse désinvolte et pure folie, Luthor impose ce faussé entre deux contrastes de bien et de mal développés précédemment. Symbole également souligné par le tableau renversé dans la demeure familiale.
Alors que le métrage fait son bonhomme de chemin en prenant un temps d’exposition de ses personnages record pour un film de cette trempe, la machine hollywoodienne, ne perdant pas de vu son cahier des charges (vous vous rappelez), passe la seconde. Ce cahier des charges, menant tout droit à la rencontre entre les deux titans, se met ainsi plus ou moins bien en place, cumulant les raccourcis forcés pour ne pas obtenir un film de 5h30. Ce récit, où Batman tente de récupérer des mains de Lex Luthor la kryptonite qui lui permettra de terrasser Superman, fait tout doucement glisser la machine Hollywoodienne vers son but final, afin de proposer un film à grand spectacle et LA grande confrontation promise par le titre.
Subissant de plein fouet ce cumul des mandats, la rencontre tant attendue entre les deux colosses tourne bien évidement court. Ce qui était promis par le titre n’a finalement pas réellement lieu et force est de constater que le film tendait plus vers un « Batman s’unie enfin à Superman vers un but commun ». Mais, là encore, faisons-nous l’avocat du diable en ressortant notre cahier des charges. Le métrage, honnête dès son titre sur ce propos, a pour ambition d’installer la « Justice league ». Partant de ce postulat, il est logique, voire convenu, que malgré tous leurs griefs, les deux ennemis vont devenir copains. Comment se plaindre donc de la durée de leur combat ou plus encore, de saboter à l’extrême les raisons de leur revirement de situation ? Sur le point d’abattre l’homme de fer, Batman finit donc par se raviser lorsque Superman lui annonce que s’il le tue, Luthor va tuer sa mère, kidnappée plus tôt par le despote. Intervient ici donc une des nombreuses autres critiques que j’ai pu lire un peu partout sur le net et qui, malgré toute la compréhension que je peux en avoir, m’interroge toujours. Il est bien évident que ce revirement est bien trop soudain, bien trop expédié suite à un combat dantesque, pour lui accorder, dans la fougue de l’action, beaucoup de crédit. Mais si la forme souffre une nouvelle fois de ce besoin d’aller à l’essentiel, le fond lui, fait pourtant écho à tout ce qui a été développé précédemment. Il est bien évident que Batman ne tue pas Superman parce que leur mère respective ont le même prénom. Il serait FOU de penser cela et pourtant, combien de fois ne l’ai-je pas lu ? Le prénom « Martha » est en effet celui de la mère de Bruce, Martha Wayne, ainsi que celui de la mère adoptive de Superman, Martha Kent.
Je m’expliquais précédemment en ces termes « un lien fondamental du métrage unit ici les personnages : l’amour de la famille et de ceux qu’on aime sont les seuls liens forts qui nous maintiennent en vie et font de nous des êtres humains. » et c’est précisément toute cette résonance qu’offre ce revirement soudain de situation. Le prénom de Martha, replace immédiatement Superman dans son statut d’humain. Ce n’est plus l’homme de fer qui implore ici Batman, mais Clark Kent, le fils. Ce prénom, intime aux deux personnages, renvoyant ainsi Batman à sa condition d’homme, à celui de ce fils dans cette allée poisseuse de Gotham où le film a commencé, à ses parents et à leur bourreau que par l’assassinat de Superman, il est sur le point de devenir à son tour. Batman devenant ici capable, par cette prise de conscience soudaine, en épargnant Superman, de sauver à son tour une vie et de redonner de l’équilibre à sa vie faite de chaos et de mort. Le divin devient un simple homme, fragile et impuissant, soumis à la volonté de l’autre et l’homme détruit, le monstre détruit, devenant pour la première fois maître de son destin et redevenant un homme a son tour.
La dernière partie, raillée elle aussi par des fans et autres critiques enragés, instaure celui qui, plus ou moins bien tapi dans l’ombre depuis la dernière bande-annonce, s’impose comme LE vrai méchant du métrage : DOOMSDAY. Car si Batman et Superman ont réussi à s’unir et gagner leur statut d’hommes, Luthor, lui, a enfin créé son monstre. La machine Hollywoodienne, elle, continue son petit bonhomme de chemin en finissant de cocher les dernières cases vides de son cahier des charges. Le combat final épique, opposant Batman, Superman ainsi qu’une Wonderwoman énigmatique un tantinet introduite comme un cheveux sur la soupe, peut prendre place et lâcher tout son grand spectacle. C’est après un âpre combat entre les forces du bien et du mal que DoomsDay est vaincu. Mais là encore, fidèle comme bien des fois durant le métrage à son matériau de base : le comics, Snyder s’autorise à tuer Superman. Tuer Superman me direz-vous ? Certainement pas, on ne tue pas Superman, qui renait toujours de ses cendres. A Snyder de nous laisser comme lors du premier envole de Superman dans « MoS », sur quelques grains de terre virevoltant, promettant sa résurrection triomphante pour le prochain film et clôturant ainsi le métrage sur la promesse du retour d’un Dieu, redevenu le temps d’une séquence clé un homme qui s’est sacrifié par amour des siens.
Je pourrais revenir sur la sois disant absence de Loïs Lane qui, bien que moins utile à l’intrigue que le reste des personnages, est pourtant essentielle pour instaurer la psychologie de Superman et le devenir du héros à travers les rêves de Batman et autres caméos. Je pourrais revenir sur ce Batman offrant une, si ce n’est la meilleure incarnation du Caped Crusader jamais vu au cinéma, à cheval entre « The Dark Knight returns » de Frank Miller et le Batman des productions Rocksteady. Ben Affleck, impérial aussi bien en costume, que sous celui-ci. Je pourrais parler des nombreux clins d’œil aux comics, de DarkSeid et de tant d’autres choses…
Il m’est impossible de revenir sur toutes les failles et sur tous les passages merveilleux du film, tant ce dernier est complexe pour un blockbuster de ce genre. Malgré ses raccourcis et ses défauts inhérents à un projet case gueule de ce genre, « BvS » est un beau film transpirant l’amour du travail bien fait et réussissant en un film, ce qui jamais n’avait été fait auparavant. Il est objectivement impossible de fustiger aussi gratuitement un film si exigent dans une époque telle que la nôtre, dont le mode de création des super-héros a été exclusivement chapeauté depuis près de 10 ans par le rouleau compresseur Marvel.
Alors, NON, encore une fois, le film n’est pas parfait, loin s’en faut. Ce n’est pas cette vérité qui est ici remise en question. Mon but n’est pas de convaincre qui que ce soit de l’aimer ou non, chacun sa vision de la chose. Non, il est ici important de remettre en cause l’injuste sévérité des propos lus et entendus au sujet du film et entendus depuis longtemps sur bien d’autres productions, « Star Wars VII » en tête de gondole. Le spectateur veut tout et son contraire et confond exigence avec pertinence. Confond sensibilité et objectivité. Condamnant un film qui tente de proposer le meilleur de lui-même en amorçant un tournant encore jamais vu. Proposant un univers riche, foisonnant, trop peut-être, mais qui a au moins le mérite d’essayer, de proposer et de tenter des paris fous, pour la plupart très réussis. Et, si le film doit être condamné pour ses erreurs, certes nombreuses, qu’en est-il de tous les autres films qui semblent être passés par la grâce du public, alors que tant de fois discutables..Il y aurait tant de films à aborder mais ce sera pour un autre débat.
Pour terminer, non, « BvS » ne mérite pas ce flot de merde qui lui tombe sur la gueule depuis un mois. Loin de là. Un film est une promesse, quel que soit le spectacle. Et cette promesse, comme toute chose, obéit à des règles strictes et immuables. Il est impossible de juger une œuvre sans prendre en compte ce postulat de base. « Bvs » est un film choral maladroit, épris de bonnes intentions, foutraque mais généreux, tordu mais fidèle dans l’exercice oh combien compliqué qu’il tente de réussir. Et surtout, foutrement courageux dans les nombreux thèmes abordés et ceux dont il pose les bases pour le futur. Car oui, malgré tout, ce film transpire l’amour pour ses personnages et son sujet. Je lui souhaite, dans quelques années, face à des esprits plus apaisés, de retrouver à l’image de « Man of Steel », un peu plus ses lettres de noblesse.
Et s’il vous reste encore quelques minutes a perdre, je vous encourage bien vivement à aller voir le dernier « Après séance » du fossoyeur de films. Qui exprime tout en vidéo, une opinion sur le film que je partage vous le comprendrez aisément, à 300%.
Ciao.